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Le droit de propriété l’emporte sur le droit au respect du domicile de l’occupant sans droit ni titre

Civil - Immobilier
29/11/2019
L’expulsion étant la seule mesure de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur un bien occupé illicitement, l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect du domicile de l’occupant ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété.
Dans un arrêt du 28 novembre 2019 publié sur son site internet, la Cour de cassation a rappelé fermement que, si la mesure d’expulsion d’un occupant sans droit ni titre caractérise une ingérence dans le droit au respect du domicile de celui-ci, protégé par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, cette ingérence, fondée sur l’article 544 du Code civil, selon lequel la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, et sur l’article 545 du même code, selon lequel nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité, vise à garantir au propriétaire du terrain le droit au respect de ses biens, protégé par l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et par l’article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la convention précitée.

En l’espèce, une commune, propriétaire de parcelles en bordure d’autoroute sur lesquelles était installé un campement de gens du voyage, a assigné en référé les occupants pour obtenir leur expulsion.

Les juges du fond ont rejeté sa demande. Les relèvent que les personnes dont l’expulsion est demandée occupent effectivement sans droit ni titre depuis 2015 deux parcelles appartenant à la commune et que le trouble manifestement illicite est avéré du fait d’une occupation irrégulière des lieux.
Néanmoins, ils estiment qu’il ressort des pièces versées aux débats que l’expulsion est de nature à compromettre l’accès aux droits, notamment, en matière de prise en charge scolaire, d’emploi et d’insertion sociale, de familles ayant établi sur les terrains litigieux leur domicile, même précaire, en l’absence de toute proposition de mesures alternatives d’hébergement de la part des pouvoirs publics, de sorte que la mesure sollicitée apparaît disproportionnée au regard des droits au respect de la vie privée et familiale des personnes concernées, à la protection de leur domicile et à la préservation de l’intérêt de leurs enfants.

La Cour de cassation censure ce raisonnement au visa des articles cités dans son attendu de principe : « En statuant ainsi, alors que, l’expulsion étant la seule mesure de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement, l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect du domicile de l’occupant ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Sur la protection juridique de la propriété, v. Le Lamy Droit immobilier 2019, n° 3.
Source : Actualités du droit